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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/175

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frayeur que le goût de l’amour. De temps en temps lui revenait avec délice la vision de l’École : la cour carrée ouvrant sur le quai, le petit escalier à carreaux rouges qui monte à gauche, et là-haut l’atelier si longtemps convoité, l’atelier des femmes peintres, si vaste, si somptueux, avec ses hautes boiseries fleuries, d’une nuance gris perle…

En rentrant quai Malaquais, elle trouva l’atelier plein de gens venus la féliciter. D’abord, les Houchemagne, puis Juliette Angeloup et sa fille, puis Blanche Arnaud, puis Addeghem. Cousine. Jeanne, l’après-midi, était allée voir si le nom de Marcelle était enfin au tableau, dans la galerie de la rue Bonaparte. Quelle joie quand elle l’avait lu ! Dès ce soir, Nicolas et elle étaient accourus pour embrasser la future femme célèbre.

Marcelle se sentait regardée par Houchemagne. Il l’intimidait toujours terriblement ; il semblait jusqu’ici ne guère croire à sa vocation. Et véritablement elle ne connut jusqu’au fond l’ivresse. de son succès, elle n’en sentit le vrai goût que là, ce soir, en face du grand Houchemagne, qui l’observait si curieusement.

— Eh bien ! ma petite cousine, vous voulez donc tout à fait décidément devenir artiste ?

— Artiste ? répliqua-t-elle vexée, mais je crois que je le suis déjà.

— Pourquoi pas ? reprit Nicolas.

— Bien sûr, dit Juliette Angeloup ; j’ai vu de ses nus, ils m’ont stupéfaite.