Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/176

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— Et si jeune ! ajoutait Blanche Arnaud, qui ne cessait de la contempler de ses yeux humides, comme un prodige attendrissant.

L’ex-comtesse Oliviera avait entraîné François dans un coin de l’atelier, sous les colonnes du Parthénon, et elle lui parlait à voix basse, en rafraîchissant son bras blanc et gras d’Orientale à la rondeur du fût de plâtre qu’elle enlaçait. Ils étaient sans cesse en conciliabules ; cette intimité occupait l’oisiveté du jeune homme qui, depuis son échec du mois d’octobre, traînait sa vie de désœuvrement dans l’atelier de sa mère, sur le pavé de Paris, cherchant une situation. Marcelle, qui savait leur flirt, les suivait des yeux, intéressée. Nicolas revint à elle :

— Il faudra conserver votre zèle pour le travail, en vous réservant cependant le loisir de penser, d’étudier la vie, d’étudier les maîtres. Ce n’est pas seulement avec sa main, avec son œil, c’est avec son âme qu’on est artiste.

Sa gloire mondiale, son autorité sur toute une école de jeunes qui se réclamaient de lui, le succès de chacune de ses toiles, son Saint-Louis, son triptyque de Saint-François d’Assise, sa Dame à l’Agneau qu’on voyait reproduits à chaque coin de rue lui donnaient un tel prestige, que Marcelle l’écoutait docilement, heureuse de l’attention qu’il daignait lui accorder. Et pour la première fois, elle eut un mot spontané, un cri d’enfant sincère :