Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/177

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— Vous m’aiderez ; vous me donnerez des conseils quelquefois ?

Il la regarda, surpris d’une telle phrase. Elle levait sur lui un regard adouci qui ne dérobait plus sa flamme intérieure. Il l’avait toujours connue muette, indifférente, impénétrable, souvent hostile, cruelle quelquefois. Elle lui était franchement antipathique. C’était sans doute la joie de la réussite qui la changeait aujourd’hui. Il répondit :

— Je serai toujours disposé à vous rendre. service, si je le puis.

Il était onze heures quand Nugues arriva pour embrasser la petite camarade. C’était maintenant un homme rangé, un bourgeois, depuis qu’il avait épousé, l’année précédente, une dessinatrice. de mode qui l’avait associé à son industrie. Ils avaient déjà un petit garçon ; tous deux travaillaient huit heures par jour. Et il engraissait, et il s’habillait comme tout le monde, et il avait pris un livret à la caisse d’épargne sur la tête du petit. C’était Vaupalier, maintenant chef d’atelier aux Beaux-Arts, qui lui avait appris l’admission de Marcelle. Ah ! qu’il était content !

— Vous verrez qu’elle nous damera le pion à tous, cette gamine. Elle réussira, elle réussira !

On n’avait d’yeux que pour « la gamine » ; on l’entourait, on l’admirait. C’était un grand roseau ; ses yeux verts n’exprimaient aucun sentiment. Ses cheveux blond pâle, tordus à la hâte, retom-