Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/180

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dans l’escalier en pensant à l’accueil qu’on allait leur faire, là-haut.

— C’est la gamine qui va être heureuse ! disait l’excellent Nugues.

Dans l’atelier, ce furent des cris, une explosion de gaieté. Addeghem criait qu’il fallait absolument griser la petite, dût-on lui faire vider toutes les bouteilles de champagne. Juliette Angeloup, en roulant sa cigarette, riait aux larmes en racontant un souper que des camarades lui avaient offert en 1877, quand elle avait eu sa médaille au Salon. C’était Darsac, le membre de l’Institut, officier de la Légion d’honneur, qui tournait le punch et servait. L’héroïne du jour, très fiévreuse, avait avalé d’un trait le liquide brûlant ; et qu’avait-elle trouvé au fond de la coupe ? la rosette de Darsac ! la rosette de la Légion d’honneur qu’il avait laissée choir dans le rhum, en l’agitant. Tout le monde avait pris des airs dégoûtés, mais elle y avait vu un présage ; elle était folle de joie ; elle avait embrassé Darsac en lui prédisant qu’elle serait, un jour, décorée. Dieu merci, ça n’avait pas manqué !

Blanche Arnaud, qui ne s’était jamais trouvée à pareille fête, avait bien fait mine de partir à minuit ; mais on n’avait eu qu’à la prier un peu. Puisque miss Spring était en Angleterre, elle pouvait bien se permettre un peu de distraction. Et elle s’était laissé faire une douce violence. Cousine Jeanne évoquait le souvenir des modestes