Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/214

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à mademoiselle Arnaud, qui entrait en convalescence.

À ce moment, Marcelle avait tenu bon et n’était pas encore retournée rue Visconti. Aux Beaux-Arts, elle ne donnait pas un coup de pinceau. Elle était immobile à sa place, les yeux sur le modèle. Pourtant elle ne voyait rien ; elle pensait à Nicolas, elle l’appelait, le désirait, se disait qu’elle mourrait s’il ne l’aimait pas, Seldermeyer survenait, voyait cet accès de paresse, la malmenait ferme. Ou bien parfois sa voisine, la Russe, prononçait de sa voix musicale :

— Eh bien, Fontœuvre, vous êtes longue à travailler !

Oui, elle pensait à mourir. Vivre avec ce fardeau sur le cœur devenait un supplice. Au fond, elle espérait que Nicolas serait venu l’attendre à la sortie de l’École. Mais il n’avait pas fait un pas vers elle. Et elle goûtait d’avance la joie qu’il y aurait à se tuer sous ses yeux pour lui laisser un impérissable remords.

Un après-midi que madame Fontœuvre, exténuée, s’était couchée, Marcelle se décida enfin à se rendre chez Blanche Arnaud. Celle-ci, qui ne quittait pas encore son lit, manifesta une joie sans mesure à voir la jeune fille. Elle baisa ses longues mains maigriotes.

— Ah ! que vous êtes bons tous ! Ah ! que c’est délicieux de posséder de tels amis ! On me plaint, mais je suis heureuse, trop heureuse.