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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/218

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ses yeux pour y plonger les siens. Ses tempes battaient, ses oreilles bourdonnaient. Elle quitta brusquement Blanche Arnaud et se trouva, sans savoir comment, après avoir marché cinq minutes. en aveugle, oppressée, à bout de souffle, sur l’esplanade de Montmartre.

Une chaleur torride pesait sur Paris qui, en bas, fumait sous le soleil. La ville était noyée d’une buée fauve ; on aurait dit un lac de vapeur brûlante dont émergeait seulement là-bas, la coupole étincelante des Invalides. Et la température suffocante ayant fait le vide des promeneurs autour de la basilique, la frêle Marcelle était seule sur l’Esplanade embrasée, debout, contemplant à ses pieds la cité grise dont la rumeur sourde emplissait l’air. Elle se moquait du soleil, de l’atmosphère de fournaise, de la poussière qui lui entrait au yeux et aux narines. Une idée venait de la clouer sur place, frémissante jusqu’au vertige parmi cet océan indistinct des toits, il y avait un toit sous lequel, à cette minute précise, était Nicolas. Ses prunelles perçaient la brume, elle s’orientait. À force de fixer des points de repère, elle découvrit les tours de Saint-Sulpice semblables à deux colonnes trapues. Puis Notre-Dame se dessina vaguement, et Marcelle délimita le trajet de la rue Bonaparte, celui de la rue Visconti. Nicolas était là, à cette place certaine…

Comment ! Elle avait pu demeurer dix longues, dix affreuses journées si près de lui sans le revoir !