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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/222

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— Laissez-moi m’asseoir un moment près de vous, sans rien dire ; je n’ai plus… je n’ai plus de forces…

Il courut lui chercher une des chaises de paille où elle se laissa tomber. Elle ferma les yeux, et lui demeura debout devant elle, effrayé, la croyant souffrante, se retenant de l’embrasser comme on embrasse un petit enfant malade.

Et, pour la seconde fois, un éclair de lucidité traversa son âme. Il se redressa, eut un regard fier d’artiste puissant sur ces murs de chaux où s’accrochaient son Sphinx, son Taureau ailé, le Centaure ; où l’on voyait les merveilleuses ébauches du triptyque de Saint François, où la Multiplication des Pains, colossale, s’esquissait triomphalement, annonçant déjà l’œuvre maîtresse, la plénitude du talent ; et il se retrouvait bien étonné d’apercevoir dans ce repaire de travail, d’où il avait farouchement chassé tous les intimes, cette frêle forme de jeune fille si humble, si craintive.

En cette adolescente qui le désarmait, l’attendrissait, sommeillait pourtant la bête féminine inconsciente et terrible qu’il ne connaissait pas, dont il ne pouvait ni se méfier, ni se garder. Seule une alarme obscure l’avertissait du péril, mais de quelle voix lointaine et sourde !

— Nicolas, murmurait Marcelle, si je mourais, auriez-vous un peu de chagrin ?

— Mourir ! répéta-t-il angoissé, vous parlez de