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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/285

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toute son enfance et de la dignité de tous les siens, il imposait Marcelle !…

— Car, vois-tu, continuait le bonhomme en distribuant, d’un geste presque noble de patriarche, la nourriture dans les assiettes, ma bru, pour moi, c’est une autre enfant. Et moi qui suis vieux, je peux bien dire que je n’ai pas rencontré chez les bourgeois une femme qui lui ressemble. Tu as eu tous les bonheurs, Nicolas, car ta femme, il n’y en a pas de plus belle ni de meilleure. D’abord, pour la figure, c’est un vrai portrait ; et pour la douceur, c’est un ange. On n’a qu’à l’écouter parler pour se sentir tout remué. Ah ! je me rappelle le grand dîner où tu m’as invité chez toi. Jamais je n’avais été dans ce monde-là ; eh bien ! quand ma bru était près de moi, j’étais aussi à mon aise que le dimanche, quand je vais faire une partie à l’Image.

— Oui, Jeanne est bien digne de votre affection, père.

Mais l’excitation du repas, la joie profonde de recevoir son enfant, animait de plus en plus le vieillard ; et, le souvenir de Jeanne se précisant dans son esprit à mesure qu’il en parlait, il ne tarissait plus. Cette grâce d’une femme exquise l’avait charmé ; il trouvait pour la louer des expressions pittoresques ou touchantes. Durant tout le repas, il ne fut question que d’elle. Marcelle était silencieuse. Nicolas écoutait douloureusement, avec une ancienne habitude de