Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/291

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— Regarde-moi, lui disait-elle, regarde-moi bien. C’est moi le mal : chasse-moi.

Il murmura, dans une sorte d’extase :

— Jamais nous ne nous sommes tant aimés.

— Jamais ! répondit Marcelle transfigurée.

— Et jamais plus nous ne nous embrasserons, Marcelle ?

— Jamais plus.

— Jamais plus nous ne nous enivrerons l’un de l’autre ?

— Jamais plus.

— Nous nous fuirons ?

— Nous nous fuirons, oui ; jurons-le, veux-tu ?

— Oh ! frémit Nicolas, le jurer !…

— Moi, je le jure bien.

— Alors, reprit-il en s’exaltant de plus en plus, je jure de te sacrifier, et de vouloir ta souffrance, et de tolérer, après avoir cueilli la fleur de ta jeunesse, que tu demeures isolée dans la vie, sans soutien, sans amour, sans direction. Je permettrai que tu me deviennes étrangère, que le cri de ta douleur ne parvienne même pas jusqu’à moi. J’endurerais même que tu…

Il s’arrêta, net, tout blême, tout convulsé.

— Regarde-moi, reprit-il, à son tour, je suis un cadavre.

— Es-tu en paix ? demanda Marcelle, les yeux secs.

— Oui, je suis en paix, comme un mort.

— Alors, disons-nous adieu.