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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/30

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quand la petite Angeloup escortée de son père, s’en allait copier les Velasquez au Louvre, elle était bafouée par les rapins, qui ne voyaient en elle que le ridicule d’une jeune fille timide, empiétant sur leurs privilèges. Alors, elle a voulu cesser d’être une jeune fille timide ; elle a rasé ses magnifiques cheveux, elle a supprimé de sa toilette toute grâce féminine et elle les a regardés en face, les rapins, en leur disant qu’elle était un homme comme eux. C’était très crâne. Et vous, mesdames, vous ne dites pas que si vous pouvez aujourd’hui conserver tout votre charme, c’est un peu à la mise baroque de cette aïeule que vous le devez.

Et tout le monde rit, quand précisément, sur cette phrase du grand homme, Juliette Angeloup ouvrit la porte. Tous la connaissait ici. On l’entoura.

— Nous parlions de vous ! Justement nous parlions de vous !

Son valet de chambre était derrière elle, chargé d’énormes paquets. Elle faisait sa tournée d’étrennes. C’était la part des petits Fontœuvre. qu’elle apportait. On appela les enfants pendant qu’elle déballait elle-même les jouets. Marcelle avait les yeux luisants de désir devant cette fée Carabosse ; en effet, cette vieille artiste qui caressait et léchait ses tableautins avec des brosses de soie pour arriver à une peinture jolie, unie et comme sucrée, qui ne produisait que des images tendres, fraîches, éthérées, ressemblait à une sor-