Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/374

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que tous les groupes disséminés dans le grand atelier se rapprochèrent avec une animation unanime, et, délivrés de toute contrainte par le départ de Jeanne, les invités se mirent à juger Houchemagne.

— Il ne faut pas se le dissimuler, c’est un artiste fini, dit Addeghem. Ce qu’en pense sa charmante femme ne prouve rien. D’abord, ce Christ dont elle parle, n’aurait-il pas eu le temps de le peindre, depuis un an, s’il possédait encore sa puissance d’autrefois ?

— Et puis, ajouta Vaupalier, nous savons bien ce qu’il en est depuis quelques mois, il tâte le public avec de bonnes petites toiles fabriquées soi-disant pour la vente, mais qui lui servent au fond à s’essayer, à se faire la main. Et, ma foi, j’ai vu chez Vaugon-Denis une Marchande de mouron pour laquelle je donnerais bien sa Sainte Agnès !

— Il a les moyens de faire la peinture qui lui plaît, continua Nugues ; il peut se passer de vendre autant d’années que ça lui chantera de peintre des anges ; or, je sais par Vaugon-Denis qu’il se donne maintenant à des sujets mondains.

— De la réalité, à la bonne heure ! s’écria Nelly Darche.

Marcelle écoutait, tremblante. Sa tête altière s’était redressée ; elle toisa tous ces gens qu’elle considérait comme des pygmées auprès de son amant, et ne put retenir un cri :

— Que dites-vous là ? Houchemagne est mon