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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/377

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Il ne se décidait pas à lui avouer qu’il travaillait ainsi pour elle, et une angoisse le prenait à l’idée de ce que pouvait élaborer ce cerveau inquiet. Debout l’un devant l’autre, ils se scrutaient ardemment. À la fin, Nicolas s’adoucit, il tendit les bras :

— Aie confiance en moi, Marcelle, pria-t-il, fais-moi crédit. Je suis devenu artisan, d’artiste que j’étais, mais je veux que tu m’estimes encore.

— C’est vrai que tu as vendu par Vaugon-Denis une marchande de mouron ? interrogea Marcelle.

Il fit signe que c’était vrai, en effet.

— Et d’autres toiles encore ?

— Et une autre toile encore.

Il y eut un silence. Marcelle reprit :

— Et ton œuvre ?…

— Mon œuvre ? c’est toi qui la feras, peut-être…

Alors, elle comprit la vérité et vint se jeter en pleurant sur son épaule.

— Ah ! c’est moi qui t’ai conduit là ; tout ce que tu souffres, tout ce qui t’amoindrit, la destruction du grand artiste que tu étais, c’est moi qui en suis la cause. Tu avais raison, tu avais raison, notre amour est maudit. J’ai été ton mauvais ange ; j’ai été pour toi le malheur !… Et voilà où je t’ai réduit ; pour entourer notre amour de plus de douceur, tu travailles contre ta conscience… Mon pauvre Nicolas !

Lui, qui la tenait dans ses bras, oubliait tout maintenant.