Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/382

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les visages des deux Parisiennes, à les reconstituer. Jeanne, qui le voyait se fatiguer, le suppliait d’abandonner cette tâche.

— Mais pourquoi, pourquoi t’obstiner à de tels travaux ! répétait-elle. Quelle femme vois-tu donc en moi ? une étrangère, s’il ne nous est plus permis d’associer nos soucis ?

Il finit par s’emporter contre elle :

— Oh ! je t’en prie, ne te mêle pas aux affaires de ma conscience. Ne me diminue pas encore !

Il espérait pouvoir reprendre les étoffes, mais, vers le milieu de l’après-midi, la fièvre le saisit de nouveau, résultat de son imprudence : ses dents claquaient, la brosse tremblait entre ses doigts. Il lui fallut bien s’étendre, sa volonté vaincue.

Cependant Marcelle subissait exactement tous les tourments qu’il avait imaginés. Seule, dans les chambres blanches, là-bas, elle l’avait attendu plus d’une heure, et sans le moindre doute, elle avait conçu la vérité : Nicolas était malade.

Son extrême jeunesse, et le fait de n’avoir jamais vu la mort frapper tout près d’elle, peut-être aussi l’habitude de considérer son amant comme un être d’exception, plus fort que les forces mêmes de la nature, écartèrent de son esprit les précises inquiétudes, Mais elle subit, avec une violence que doublait la ferveur de son âme, ce châtiment affreux des amours coupables : l’impossibilité d’assister dans la maladie un être