Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/395

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l’autre, toutes les flammes s’éteignaient. Il pesait les différents actes de sa vie ; il remontait à son enfance ; il revoyait la maison natale où sa formation s’était préparée, sinon accomplie ; il allait plus loin encore en arrière, jusqu’à son ascendance ; l’idée de son vieux père lui causa un attendrissement ; il désira le revoir.

— Jeanne, dit-il, envoie quelqu’un à Triel et qu’on me ramène mon père.

Dès ce moment, ses yeux ne quittèrent plus l’image inachevée de Jésus, cette figure à laquelle il avait donné l’expression de justicier, et dont les yeux terribles fouillaient son âme. Les paroles scandées du Credo lui revenaient, telles qu’on les chantait dans son église quand il était petit : Venturus est judicare vivos et mortuos. « Mais je me suis jugé moi-même, pensait-il, et ma réprobation c’est moi qui la prononce. »

Cependant l’idée d’une sanction extérieure à lui-même, d’une parole supérieure à celle de sa conscience, l’idée d’un maître, s’affirmait en lui. Sa conscience n’était que la servante. Jeanne vit encore ses lèvres s’agiter faiblement : elle se pencha et entendit :

— Il va venir ; il vient.

Elle crut qu’il s’agissait du père Houchemagne.

— Il ne peut être ici avant quatre heures, mon pauvre chéri.

Nicolas sourit. Celui qu’il attendait, c’était le Maître de la conscience humaine, l’Auteur de la