Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/42

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par ce flot de louanges qu’il prenait fort bien pour de la monnaie courante. Jenny s’était préparée à mettre à l’aise ce fils du peuple que le petit apparat de son dîner allait déconcerter, peut-être. Mais voici qu’il ne paraissait nullement timide. Il n’avait encore rien dit ; il avait seulement salué avec simplicité, et tout le monde se taisait, on était interdit. La vieille Angeloup examinait le nouveau venu. Nelly Darche le comparait à Nugues, à Pierre Fontœuvre, au vieil Addeghem.

— Je suis confus, prononça-t-il enfin ; on est beaucoup trop bon.

— Mon cher, dit Addeghem, j’ai eu l’idée de vous faire venir ici ; vous êtes dans un milieu de vrais artistes. Tous, vous vous comprendrez.

Et le critique lui refaisait l’histoire de chacun. Cette petite Fontœuvre, c’était un peintre délicieux ; il verrait d’elle, tout à l’heure, un étonnant portrait de fillette. Et Fontœuvre, quelle sûreté dans le dessin ! et Nugues, quelle sincérité ! et Darche, quelles colorations ! et sa vieille amie Angeloup, quelle distinction !

— Mais je n’ignore personne ici, fit Houchemagne finement, je connais mes salons.

Et comme, par un bienfaisant hasard, il se rappelait fort à propos une panthère, signée Fontœuvre, qui était, l’an passé au Grand Palais, il fit les compliments d’usage. Dès lors, Pierre Fontœuvre l’adopta. Ils furent amis. L’éloge prononcé par le peintre inconnu avait inondé de