Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/48

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Juliette Angeloup, illuminée. Ah ! la belle fille ! Ah ! les belles hanches de satin ! Quelle chair d’aurore, quelle ligne ! et ce pied, ce pied en accent circonflexe et d’une telle substance qu’il semblait n’avoir jamais foulé que des gazons humides !

La jeune femme de chambre, la taille ronde comme un fût de bouleau, tout en noir, avec les falbalas d’un tablier blanc qui lui grimpait aux épaules, passait le vol-au-vent. La poularde avait été apportée un instant sur la table, pour l’œil ; maintenant Brigitte la découpait à la cuisine. Jenny Fontœuvre lançait des regards satisfaits sur le couvert. On plaignait tout haut Brigitte forcée de récurer les casseroles, malgré les brillants souvenirs de son passé.

— Mais, déclara Nelly Darche en décortiquant de la pointe de son couteau un aileron de la poularde, une femme n’a jamais de passé.

Et comme on s’étonnait, tout habitué que l’on fût à ses paradoxes :

— Hé ! non ; peu d’hommes en ont ; quant à la femme, elle ignore totalement ce que c’est. Brigitte, lorsqu’elle pèle un oignon, ne pense pas plus à ses attitudes plastiques d’autrefois, que si la Rose printanière qu’elle fut jadis était sa voisine. C’est pourquoi Vaupalier a pu très raisonnablement épouser Dudu, qui était une petite diablesse de modèle, et qui fait aujourd’hui une très sortable madame Vaupalier.