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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/65

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Puis, à peine assise :

— C’est aujourd’hui que nous allons voir les tableaux d’Houchemagne ?

— C’est aujourd’hui, répondit madame Fontœuvre.

Les deux jeunes femmes se sourirent à la dérobée. Fontœuvre déclarait que c’était pour Addeghem s’il allait à cette exposition, qui, malgré la singularité des sujets exhibés, devait être atrocement banale. On lui avait conté qu’Houchemagne n’avait aucun caractère, pas de procédé, pas de nerf dans l’exécution :

— Un gentil garçon, d’ailleurs, ajouta-t-il, mais un peu nul.

— C’est-à-dire que son art l’obsède constamment, repartit Jenny.

Jeanne de Cléden savait qu’il avait remarqué sa photographie. Elle était très occupée de lui. C’est pourquoi elle changea la conversation. Elle se mit à parler de l’existence qu’elle s’était faite dans sa solitude bretonne. Le château de Cléden était bâti sur la grande plaine de Sibiril, au fond du Finistère. C’était une petite place forte qui avait subi des assauts pendant les guerres de Bretagne. Il y avait un donjon, deux tourelles à créneaux, des meurtrières en ogives et des fossés pleins de gazon. Alentour, la campagne était plate, désolée, sans un arbre, hérissée d’ajoncs d’or. Au loin, on apercevait la mer et le clocher à jour de Saint-Pol-de-Léon. M. de Cléden laissait sa fille vivre