Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/77

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déclara d’une voix chevrotante qu’il avait un tempérament magnifique, Juliette Angeloup disait :

— Je ne comprends pas tout, non, je ne comprends pas tout ; mais c’est diablement peint, monsieur !

Le petit Vaupalier, frêle comme un saxe, avouait qu’il était transporté et qu’il donnerait toutes ses toiles pour avoir fait le Centaure. Quelques-uns se défendaient contre l’admiration. Nelly Darche, par exemple, qui demeurait silencieuse.

— Ah ! si vous aviez peint de la vie, avec cette habileté-là ! déclara-t-elle enfin.

Blanche Arnaud et miss Spring, timides dans leurs costumes démodés, terriblement vieilles filles avec leurs gestes étriqués et leurs gants de coton noir, s’avancèrent à leur tour. Miss Spring, qui n’avait jamais su parler français, commença dans un charabia prolixe des félicitations entremêlées de révérences, et qui pouvaient se traduire ainsi :

— Cher monsieur Houchemagne, je suis bien aise d’avoir vu vos tableaux ; vous êtes le plus grand peintre de la France, de l’Angleterre, de toute l’Europe. Vous semblez saisir le principe même de la vie. Vous rendez ce qui est immatériel ; vous ne vous contentez pas de charmer les yeux, vous satisfaites les âmes. Vous êtes le plus grand peintre intellectuel depuis Vinci.

Elle avait, dans sa laideur britannique, des yeux de myosotis doux et charmeurs. Blanche