Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/79

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

charmante. Ce fut dans le couloir qu’ils faussèrent compagnie à la bande d’Addeghem. Ils étaient sur le trottoir de la rue Laffitte, qu’ils entendaient encore résonner, là-bas, l’organe impérieux du critique expliquant le Centaure.

Les Fontœuvre, Jeanne de Cléden, miss Spring, Blanche Arnaud et Houchemagne, grimpèrent à Montmartre dans l’autobus. On ne pouvait causer dans le fracas de la voiture ; mais cette exquise camaraderie si légère, si facile, qui naît d’elle-même entre les artistes parisiens, liait déjà subtilement ces six personnes étrangères, et l’on éprouvait le bien-être d’une intimité. C’était maintenant qu’enfin Houchemagne goûtait son triomphe. Il l’avait compris dans le discours baroque de miss Spring, dans les yeux mouillés de Blanche Arnaud, dans les prunelles rieuses de la petite Fontœuvre, et surtout dans le visage angélique de la jeune fille silencieuse. Elle l’admirait, il ne pouvait le méconnaître. Et soudain, il se rappela la petite photographie en grisaille, posée sur le guéridon des Fontœuvre…

Les deux amies habitaient, rue d’Anvers, au pied du Sacré-Cœur, dans la plus commune des maisons pauvres. L’atelier était au quatrième, au fond de la cour. On y arriva en procession. C’était une sorte de grenier vitré, sans meubles, sans tapis, sans tentures. Les lits des deux artistes étaient dissimulés ainsi que tout leur petit ménage. Elles s’empressèrent, allumèrent les