Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/156

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cœur aussi, qui vous apporte la vitalité des tropiques inconnue chez nous, et enfin sa brune figure singulière, n’est-ce pas ? Dites-moi franchement ; c’est un sujet intéressant, hein ? Cela fera dans votre musée un échantillon bien curieux, un document sans prix pour vos œuvres, il me semble. Vous écrirez un ouvrage, qui aurait un succès fou, sur les croisements de races, après que, pendant deux ou trois mois, vous aurez auprès d’elle singé l’amitié, joué l’amoureux, trompé son pauvre petit cœur tendre par votre indigne comédie, et mortellement déçu sa belle jeunesse : car c’est cela la jolie besogne que vous faites, écrivain sans pitié, beau cerveau riche, machine à penser et à écrire, dont on ne peut trouver le cœur. Que vous importe que l’enfant se soit crue aimée, que sa puérile imagination de dix-huit ans ait bâti elle aussi son roman, vous qui tenez le vôtre et qui allez l’écrire, sans souci que le sien soit brisé !

— Votre jugement sur moi est cruel, ma cousine, il ne montre pas beaucoup d’indulgence pour un vieil ami, et j’en serais fort chagriné, si je n’avais la ressource de le croire précipité.

— Mon jugement est juste, riposta Mme de Bronchelles d’un ton qui portait encore plus qu’aupa-