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Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/165

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mon public ce qui avait été, depuis presque une année, l’intérêt unique de mes jours et de mes nuits ; je n’ai pas, moi, de petit frère dont l’affection délicieuse me tienne lieu de tout ; je suis un vieux garçon désenchanté, désorienté dans l’existence, je n’ai que mes œuvres, elles sont mon souci, mes enfants, ma famille, ma raison d’être, ma joie. Veux-tu me dire ce qui me reste maintenant de mon Écervelée ? Du dégoût, l’amère saveur d’une humiliation, en même temps qu’un coup dangereux au plein de ma plume. Il me semble pourtant que tu ne me trouves pas absolument désolé.

— Ah ! c’est que, vois-tu, Nouvel, ta pièce, elle ne tenait pas à toi-même, à l’essence de ton être, comme mon malheureux petit frère me tient à moi. Je sais bien ce qu’il en est ; je l’avais suivie cette pièce ; tu me l’avais lue scène à scène ; j’y avais mis autant d’âme que si je l’avais faite ; ton succès prévu me grisait à l’avance, et vrai, j’en étais plus fier que toi. Quand j’ai su ce matin que le stupide public avait méconnu ton talent, que ce merveilleux morceau avait passé inaperçu, sans que personne en discerne l’étourdissante profondeur, j’ai reçu le coup aussi rude que toi, va, mon pauvre vieux. Je…… »