Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/166

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Il n’acheva pas ; on entendit dans le salon voisin le bruit du piano qui se fermait, puis toute la jeunesse déborda dans le cabinet de Nouvel ; les trois robes couleur de sang des demoiselles Ormicelli, la frêle Gertrude, aux lèvres tendrement ouvertes sur ses dents fines ; les Anglaises graciles ; Ogoth Bjoertz, austère comme une veuve, puis Annette.

Quand elle entra, Mme de Bronchelles l’enveloppa d’un sourire ému ; la conversation qui venait de se tenir ici, mystérieusement, donnait une telle solennité à cette heure, et c’était si troublant de la voir s’avancer inconsciente, avec sa grâce d’enfant sans souci, dans cette même pièce où une demi-heure auparavant on délibérait son avenir ! Une légère robe couleur de soufre habillait sa petite taille ondulante une de ces incomparables tailles, souples et harmonieuses, propres aux femmes de couleur — le pli de cette soie jaune encadrait la peau foncée de son col délicat ; son visage ardent, dans le stigmate ennobli de sa race, avait pris ce soir-là une fièvre inconnue, avec un cachet d’exotisme plus accentué. Ses yeux tout d’abord s’étonnèrent de trouver là l’ami de Nouvel ; puis les paroles de la vieille nourrice lui revinrent soudainement à l’esprit ; elle se rappela