Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/191

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le crime de l’écrivain, la tristesse d’être seule dans le milieu cosmopolite, où elle ne trouvait pas une âme capable de l’entendre en cet instant de désillusion première. Ce n’était pas à Vittoria qu’elle voulait se plaindre, au moment où elle sentait contre elle une involontaire rancune, presque inconsciente. Ce n’était pas à Ogoth Bjoertz qui eût discuté sa peine sans la sentir ; ni à la douce Flamande Gertrude Laerk, ni à aucune de ses autres compagnes, auxquelles il lui eût été déchirant d’avouer ce désenchantement sur son idéal. Mme de Bronchelles était là, il est vrai ; mais, avec sa finesse, elle pressentait de ce côté les avis de l’âge mûr, dont les cours de jeunes filles redoutent tant la lucidité d’ordinaire. Elle était l’amie de Nouvel, elle serait trop clémente envers la faute qui ne l’avait pas blessée ; et puis, elle avait le mandat de la marier ; qui sait si l’attrait de ce mariage-là, si brillant et si rare, ne l’aveuglerait pas sur le mobile trouble qui poussait l’écrivain ? Et Annette, elle, malgré l’amour vibrant dans son cœur, ne voulait plus revoir l’idole détrônée dont l’auréole était à jamais tombée.

Et tout à coup, comme elle sondait ainsi sa solitude dans cette nuit de larmes qui devait si rapidement finir l’enfance tardive où elle vivait encore,