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Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/286

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— Auprès du Sphinx, ma cousine, s’il vous plaît », répliqua-t-il en souriant à demi.

À la vérité, c’était le meilleur endroit du jardin pour s’isoler un peu du bavardage des jeunes filles ; mais Mme de Bronchelles comprit que le sphinx dont il s’agissait n’était pas celui de marbre blanc, et elle s’en vint de nouveau présider à la cueillette des lilas, qui avait recommencé.

Cette Johannah, qui avec sa compatriote Ogoth montrait une certaine ressemblance extérieure, était dévorée de cette exaltation concentrée qui est le trait de la femme scandinave. Jeune fille, elle s’était vouée à l’idée de dignifier l’état intellectuel de ses sœurs, et pour mieux appartenir à son œuvre elle avait brisé successivement le cœur de tous les hommes qu’avaient attirés sa beauté et son esprit. En quelques mots pleins de simplicité, Ogoth déroula ce roman à la fois sentencieux et ardent comme l’âme même qu’il dépeignait. Nouvel l’écouta sans rien dire. Il ne paraissait occupé que du seul souci littéraire. Mais, quand elle se fut arrêtée, il lui demanda :

« Et vous, Mademoiselle, comment jugez-vous cette femme, vous qui pouvez l’apprécier mieux qu’une autre, la pénétrant comme on pénètre les choses de son pays ?