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Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/299

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Elle prononça ces mots qui réglaient sa destinée, avec l’aimable banalité d’une phrase de salon. La vivacité de Mme de Bronchelles s’en irrita et ne put retenir un reproche :

« Johannah ! »

Ogoth répliqua :

« Je ne dois pas savoir si j’ai été aimée, ni même si j’aurais aimé qu’on m’aimât ; je ne suis pas Johannah, et M. Nouvel ne sera pas Sworden : mais vous, vous êtes une amie très vraie et vous devez apprendre que je suis la sœur d’un Bjoertz qui nous a déshonorés tous, après nous avoir dépossédés ; que ce Bjoertz est encore actuellement en prison, qu’il n’est pas un Norvégien à qui ce nom — le mien, Madame — n’évoque un souvenir de honte ; et que si je puis offrir à tous, sans rougir, la science que j’ai acquise seule et personnellement, j’ai le devoir de refuser à un honnête homme l’alliance de ma famille. Voilà ce que je vous avais caché jusqu’ici, le secret qui me dicte ma conduite et que je ne vous aurais point révélé si je n’avais craint que vous ne me jugiez mal. »

La « belle statue pensante » dévoilait son âme, et l’amie qui contemplait la sérénité de son visage, seulement un peu pâli, mesura à ce moment, pour