Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/306

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Mais Vittoria, qui aimait Ogoth de tout son cœur sans tendresse, s’alarma la première :

« Qu’est-il arrivé ? C’est d’Ogoth qu’il s’agit, n’est-ce pas ?

— Lisez tout haut, Vittoria, dit Mme de Bronchelles, moi je ne peux pas. »

Et Vittoria lut, de sa voix grave et sans timbre, les dernières paroles qu’on dût entendre de l’étudiante dans cette salle à manger qu’avait remplie trois ans sa personnalité si étrange, si dominante. Gertrude Laerk s’en était allée ; ç’avait été une douceur de moins dans la maison ; Annette n’avait fait que passer, laissant partout mille souvenirs de sourires et de grâce ; mais Ogoth emportait avec soi quelque chose de fort, l’influence de son prestige ; elle était de celles qu’on ne remplace pas. Pendant des mois encore son seul souvenir peuplerait la villa, et les jeunes filles sentaient déjà ce regret puissant qui mouillait les yeux de Nelly Allen, qui rendait blême le visage de Vittoria, pendant que Giuseppa sanglotait, à demi couchée sur la table.

Mme de Bronchelles endurait seule un bien autre chagrin ; ce n’était pas chez elle les regrets indécis d’une sympathie, d’une amitié finies. Elle comprenait trop tard la grandeur de cette admi-