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Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/74

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Lorsqu’on lui dit qu’elle était rendue, il lui sembla que son cœur s’arrêtait net ; elle sauta silencieusement de voiture ; elle monta l’escalier devant un beau laquais luxueux, et, sur la laine épaisse du tapis, son petit pied si ferme tout à l’heure en dansant sa fantasia tremblait dans son soulier comme un oiseau pris.

Pendant ce temps, dans les deux pièces byzantines, dont l’une était le salon de sa mère, l’autre son cabinet de travail, et où ils se réunissaient pour recevoir, André Nouvel se promenait à petits pas, une menue cigarette d’amusette aux doigts. C’était un élégant garçon qui avait beaucoup plus que trente ans, mais qui n’en paraissait pas avoir quarante, avec l’air riche que donne non seulement un veston bien coupé, mais encore le bien-être moral qui s’installe dans la physionomie d’un homme arrivé. Il n’y avait pas de longues années que, modeste employé au Ministère, il se rendait chaque matin au bureau, de la lointaine banlieue où les loyers sont moins chers, sur une petite bicyclette maigre qui sonnait la ferraille sur le pavé ; son agréable physique avait alors sans doute plus de juvénilité qu’aujourd’hui, mais il lui manquait l’indéfinissable changement que le succès opère dans un homme, et, malgré quelques assom-