Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/80

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plaire infiniment, se rapprochait d’elle à cette même minute, modeste et respectueux comme un courtisan qui demande l’audience d’une jeune reine. Or, la jeune reine, qui venait de faire inconsciemment une si honorable conquête, n’avait garde de refuser l’audience demandée. Elle brûlait d’envie d’entendre le son de cette voix sacrée qui, dans le mystère du travail, avait dû murmurer tout bas, ici, la désolation de la douloureuse Martiale, elle aspirait à sonder cette âme talentueuse, dont, pour un peu de génie et un joli style, elle s’exagérait la profondeur jusqu’à l’enthousiasme ; l’écrivain était pour elle le triomphateur intellectuel de l’époque dont la gloire l’avait exaltée, doublé du grand cœur tendre qu’il avait volontiers écoulé dans ses livres. La pauvre petite ignorante ne pouvait savoir la frivolité de ce triomphe d’auteur léger, sur lequel une plus solide gloire le lendemain était capable de passer l’éponge de l’oubli, ni le factice de cette sensibilité cérébrale, fruit d’une impressionnabilité artistique, de celles qui conçoivent les plus précieux sentiments sans les sentir.

« Monsieur Nouvel, demanda-t-elle avec une émotion délicieuse, est-ce à cette table-là que vous avez écrit Blés mûrs ?