Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/90

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virilement sous son masque d’impassibilité ; souffrance d’orgueil d’abord, de déception, et aussi de cœur, car elle était capable d’une certaine dose d’affection froide et retenue, et ce fut comme le vent de cinq ou six années d’expérience qui passa sur elle en quelques semaines. Mais le sang italien qui bouillait en elle, et que démentait sa froideur extérieure, lui fournit une compensation ; cette nature florentine, qui sait, du jour au lendemain, d’aimante devenir haineuse, et qui se délecte dans les représailles morales d’un revirement de sentiment. Elle se mit à abhorrer l’écrivain sourdement, silencieusement, avec les mêmes rares sourires qu’elle lui accordait dans le temps où elle le prisait si fort. Personne ne pouvait penser que, chaque fois qu’elle entrait, elle maudissait le seuil de sa porte, et qu’elle épuisait toutes les incantations de sa superstition native sur le chêne de sa table de travail, où pouvait au besoin se tarir son génie, les mauvais esprits aidant.

C’était dans cet état d’âme qu’elle était venue ce soir-là à l’intime réunion ; c’était avec cette haine dissimulée qu’elle avait tendu la main à Nouvel, qu’elle avait causé, souri, déployé sa grâce involontaire d’adolescente Toscane. Elle notait avec