Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/91

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d’amères émotions tous les oublis que le maître de maison avait pour elle ; le temps qu’elle avait parlé au petit malade, elle avait remarqué que Nouvel s’éloignait d’elle ; elle avait inutilement attendu le moindre regard du jeune écrivain, et puis, tout d’un coup, dans cette surveillance clandestine qu’elle exerçait sans cesse sur lui, elle avait saisi, à d’imperceptibles riens, ce nouvel aliment à sa vengeance et à sa jalousie, que la quarteronne lui avait plu.

Sa longue main fine posée sur la Revue de la table avait à peine frémi ; sa bouche s’était un peu serrée, puis elle s’était remise à feuilleter les illustrations sans que rien ait paru davantage du nouveau déchirement qui se faisait en elle, à voir sa place d’autrefois prise dans l’intérêt et l’attention de Nouvel par cette jeune fille de sang noir pour laquelle sa naturelle fierté avait distillé tant de mépris jusqu’ici. À demi brisée par l’effort de se contenir, elle s’épuisait encore à fournir la réplique aux Anglaises assises à ses côtés, tout en écoutant, par une tension d’esprit surhumaine, la causerie de l’écrivain et d’Annette ; leurs paroles lui étaient presque inintelligibles, mais comme ils étaient juste devant ses yeux, rien ne lui échappait de leurs gestes, de leurs regards,