À quoi bon grossir la liste

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La Chanson française du XVe au XXe siècle, Texte établi par Jean GillequinLa Renaissance du livre (p. 193-194).


À QUOI BON GROSSIR LA LISTE

Air : Dans la paix et l’innocence.


À quoi bon grossir la liste
De nos frondeurs ennuyeux ?
Tout prévoir c’est un peu triste ;
Rire de tout vaut bien mieux.
Que l’univers se disloque
Comme un vase du Japon,
En attendant je m’en moque
Comme de Colin Tampon, (bis)

Nargue du triste Héraclite
Qui toujours se lamentait !
Que j’aime ce Démocrite
Qui gaîment lui répondait :
Sur ce monde qui te choque,
Hélas ! mon pauvre garçon,
Tu pleures ! moi je m’en moque
Comme de Colin Tampon, (bis)
 
Damis en vain près d’Estelle
Soupire comme un Colin ;
Il faut pour plaire à la belle
Être bien riche ou bien fin :
Au plus aimable colloque
Froidement elle répond :
Des Colins moi je me moque
Comme de Colin Tampon, (bis)

Cherchant partout un suffrage,
Un auteur bien suffisant
Pour lire un nouvel ouvrage
Trouve un cercle complaisant :

Mais le public, qui révoque
Les jugements du salon,
Dit en sifflant : Je m’en moque
Comme de Colin Tampon, (bis)
 
« Ici-bas rien né m’étonne,
Disait Monsieur dé Pibrac,
« Il faut voir sur la Garonne
« Mon beau domaine dé Crac !
« Paris n’est qu’uné bicoque ;
« Lé moindre château gascon
« De votre Louvre sé moque
« Comme dé Colin Tampon. » (bis)

Qu’on célèbre le Champagne,
Le Pomard, le Chambertin ;
Qu’on vante le vin d’Espagne,
Le vin de Beaune ou du Rhin :
Pour moi, lorsqu’on me provoque,
Le meilleur est assez bon ;
Quant à son nom, je m’en moque
Comme de Colin Tampon, (bis)

Lorsque la vilaine Parque
M’aura dit : Fais ton paquet,
Je veux, jusque dans la barque,
Lui rabattre son caquet ;
Je chanterai : Ma défroque
N’est pas celle d’un capon,
Et des Parques je me moque
Comme de Colin Tampon, (bis)

Antignac.