Astronomie populaire (Arago)/III/17

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GIDE et J. BAUDRY (Tome 1p. 130-132).

CHAPITRE XVII

champ de la vision à travers une lunette


Rien n’est plus dangereux, en matière de science, que les assimilations : elles sont presque toujours fondées sur des aperçus vagues et conduisent à des opinions erronées, dont les vraies lumières de la théorie triomphent ensuite difficilement. Ne sortons pas du sujet. Pour le commun des hommes, l’objectif de la lunette est comme la fenêtre d’un appartement ; plus il aura de largeur, et plus on verra d’objets à la fois ou d’un même coup d’œil, en un mot, pour me servir d’une expression consacrée, plus la lunette aura de champ.

Cette conséquence, toute logique qu’elle paraît au premier aspect, est une grande erreur, comme il est facile de le démontrer.

Fig. 77. — Champ d’une lunette.

Soient AB l’objectif et CD l’oculaire d’une lunette (fig. 77). Menons par les bords extrêmes C et D de cet oculaire, et par le centre optique O de l’objectif, les lignes COM et DOL. L’objet ML sera représenté en M′L′. On voit que les points plus éloignés de la ligne centrale Pp que les points L et M, se peindront sur l’image, au dessous du point L′ et au-dessus du point M′ ; par conséquent, les rayons partant de tous les points, au-dessus de L, et au-dessous de M, n’iront pas après leur croisement, surtout quand le grossissement est un peu fort, tomber sur la lentille oculaire, dont aucune partie n’est en face de ces points, et dès lors ils ne seront pas aperçus.

Le double de l’angle formé par l’axe Pp et la ligne OL représente l’étendue angulaire des objets qu’on peut voir dans la lunette, lorsqu’on ne la déplace pas.

Le double de l’angle POL est ce qu’on appelle l’étendue du champ. Cette étendue varie donc avec les dimensions de la lentille oculaire ; et, lorsque cette lentille est enchâssée dans un anneau de cuivre, qu’on nomme sa sertissure, le champ dépend de l’étendue que la sertissure laisse à découvert, et presque pas de la largeur de l’objectif. Une conséquence immédiate de cette théorie, c’est que le champ d’une lunette diminue avec le grossissement ; car, à mesure que le grossissement augmente, les dimensions transversales de la lentille oculaire doivent diminuer.