Astronomie populaire (Arago)/XIV/13

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GIDE et J. BAUDRY (Tome 2p. 127-129).

CHAPITRE XIII

du noyau


Fabricius dit que la tache qui lui révéla le mouvement de rotation du Soleil était un objet noirâtre, plus rare et plus pâle d’un côté.

Galilée parle simplement de l’extrême irrégularité des taches, des grands changements de forme qu’elles subissent du jour au lendemain, de leurs nuances plus ou moins sombres.

Trompés par la faiblesse des premières lunettes et par la difficulté d’observer le Soleil sans verres grossissants, Fabricius et Galilée ne virent nettement, à ce qu’il paraît, qu’une des deux parties constituantes des grandes taches. Leur attention se porta exclusivement sur la région centrale ou la plus noire, sur ce qu’on a appelé le noyau.

Quand le noyau d’une tache diminue et disparaît, c’est ordinairement, suivant Scheiner, par un empiétement irrégulier de la pénombre.

Ce mouvement de la pénombre vers le noyau amène souvent la séparation de celui-ci en plusieurs noyaux distincts.

Le noyau s’évanouit avant la pénombre. Cet aphorisme de Scheiner est confirmé par beaucoup d’observations d’Hévélius et de Derham.

Herschel décrit le même phénomène en ces termes :

«Un noyau qui se rétrécit et va disparaître, se divise souvent en plusieurs noyaux distincts. Dans ce moment la matière lumineuse du Soleil paraît s’étendre comme un pont sur la cavité de la tache. »

Les grandes taches à noyaux noirs sont ordinairement entourées de facules à de si grandes distances, qu’on peut, à l’aide de l’apparition de ces taches lumineuses au bord oriental du Soleil, prédire quelquefois plusieurs jours d’avance l’arrivée des taches obscures.

Le contour extérieur d’un noyau est toujours net, bien défini. Cette ancienne observation de Scheiner n’a pas été contredite.

D’après Herschel, avant l’apparition d’un grand noyau, on aperçoit ordinairement à la place où il va se former, un très-petit point noir (un pore), qui s’élargit peu à peu, et non pas plusieurs points à la fois. On dirait, ajoute l’illustre observateur, que la matière lumineuse solaire est graduellement écartée dans tous les sens, par un courant ascendant dirigé vers ce premier point noir, germe de la tache.

Herschel affirme que les noyaux paraissent plus noirs près des bords du Soleil que dans le voisinage du centre. Après avoir scrupuleusement interrogé mes souvenirs, j’oserai mettre en question l’exactitude de cette opinion.

Les noyaux voisins semblent avoir une certaine tendance à se réunir. Ils grandissent ordinairement jusqu’au moment où leur réunion s’est opérée.

Galilée prouvait que les noyaux n’ont aucune saillie au-dessus de la surface solaire, à l’aide d’une observation qui mérite d’être rapportée. Il avait remarqué que l’intervalle lumineux compris entre deux taches équatoriales, quelque petit qu’il soit au moment où ces taches atteignent le centre du disque, subsiste encore près du limbe, tandis que si leur hauteur était sensible, elles se projetteraient alors l’une sur l’autre et ne paraîtraient former qu’une tache unique.

Les grandes taches paraissent faire quelquefois des échancrures noires au bord du Soleil. On cite à ce sujet une observation de La Hire, de 1703 ; une observation de Cassini, de 1719. Herschel a remarqué la même apparence le 3 décembre 1800.