Biographie nationale de Belgique/Tome 1/ALGOET, François-Antoine

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ALGOET (François-Antoine), ministre et théologien calviniste, né à Ypres vers 1536 et mort dans l’exil, avait été moine dominicain dans sa ville natale. L’interrogatoire d’un sectaire, fait prisonnier en 1567, nous apprend en outre que c’était un homme de trente ans environ, « porteur d’une barbe noire. » Voilà, sans doute, pourquoi nos chroniqueurs flamands lui donnent le nom ou le surnom de : de Swarte. Ce serait dès 1565 qu’il aurait fait sa première apparition comme ministre de la religion nouvelle, si l’on en croit le Gueusianismus Flandriœ occidentalis ; mais Jean Ballin, moine à Clairmarais, semble être mieux informé en déclarant qu’Algoet ne quitta son monastère que l’année suivante. L’abjuration des moines était alors chose assez commune ; mais il s’agit ici de l’un des prédictateurs les plus renommés de l’ordre de Saint-Dominique. Aussi l’événement se trouve-t-il consigné dans les écrits du temps, sous la date de 1566. Ce qui donne, dès ce moment-là, une valeur historique à la personnalité d’Algoet, c’est qu’il fut le premier aux Pays-Bas qui osât prétendre que la religion du Christ ne devait point considérer les églises comme des maisons de Dieu, seules propres à la méditation et à la prière. Il fit plus. Il annonça qu’il tiendrait en plein champ, à Wulvergem, village situé à mi-chemin entre Messine et Warneton, un prêche aux flambeaux dans la soirée du 11 juin 1566. Cette tentative ayant été couronnée d’un succès inattendu, il ouvrit plus hardiment l’ère des assemblées embastonnées, comme l’on disait alors, dont Herman Modet et quelques autres devaient tirer un si grand parti et perfectionner l’organisation jusqu’à en faire des camps retranchés et, au retour dans les villes, de véritables marches triomphales. Algoet aurait « épousé une femme mariée d’Ypres avec laquelle il avait vécu de vie scandaleuse fort longtemps. » C’est le moine de Clairmarais qui le dit. Si le fait avait été exact, il est à supposer que les inquisiteurs n’auraient pas manqué d’en faire mention dans leurs rapports ou dans leurs sentences : or, l’on n’y trouve rien de pareil. Chose bien autrement grave et beaucoup plus certaine, c’est que les bâtons, dont les auditeurs d’Algoet étaient toujours munis pour le défendre au besoin, servirent plus d’une fois, à l’issue de ses sermons, à tout briser à l’intérieur des églises. Des dévastations de ce genre commises, au mois d’août 1566, à Ingelmunster, à Dadizeele, à Iseghem et à Emelghem, lui sont toutes officiellement attribuées. Son dernier exploit de l’espèce, et qui démontre chez lui une audace assez rare, fut de s’emparer de l’église de Notre-Dame de Briele, aux portes de la ville d’Ypres. Quelques mois plus tard, en février 1567, Algoet avait perdu toute influence et tout prestige, et il s’estimait heureux de pouvoir se sauver en Angleterre avec les plus compromis d’entre ses partisans. Il s’en vint grossir les rangs de l’émigration flamande qui comptait, à Norwich, plusieurs milliers de calvinistes et deux pasteurs, Ysbrand Balk, dit Trabius, et Charles Ryckewaert, dit Théophile. Au bout de quatre années vouées à la prédication et à l’étude, son exaltation de moine défroqué reparut. Il eut avec des collègues des disputes tellement vives que l’évêque anglican crut de son devoir d’intervenir. Les trois pasteurs furent suspendus et leur consistoire dissous. Algoet fut le seul d’entre eux qui, plus tard, ne reçut point d’autre emploi. Il serait presque impossible de dire quelle part lui revient dans les ouvrages de polémique religieuse publiés de 1567 à 1572, sous l’inspiration et très-probablement aux frais de l’Église flamande de Norwich. Nous en avons vu quelques-uns, et ils ne nous ont rien appris. Le commerce épistolaire qu’Algoet entretint avec Ballinger[1], le réformateur de Zurich, permet tout au plus de supposer qu’il fut le traducteur du traité intitulé : Somma der Christelyke Religie van Ballinger[2], imprimé à Norwich par Antoine Solen.

C. A.. Rahlenbeek.

Arch. du Royaume, à Bruxelles, Chambre des Comptes, t. XXXVI et CXI.Annales de la Société d’Émulation de la Flandre, t. II. — J.-S. Burn’s History of the foreign réfugiés, etc., in England. Lond., 1816. 1 vol in-8o — Bibl. de Mons, Catalogue des faulx prophètes de la Flandre, par Jean Balliu, religieux de Clermaretz : Ms. no 8446. — Bydrage tot de oudheidkunde en geschiedenis, enz, van Zeeuwsch-Vlaanderen, deel II (Voir de Hervormde Vlugtelingen van Yperen in Engeland), door H.-Q. Janssen. — Musée brit. à Londres Landsw. Ms. Burgley’s papers, t. II et III.


  1. ERRATA ET RECTIFICATIONS DU Ier VOLUME : au lieu de : Ballinger, lisez : Bullinger.
  2. ERRATA ET RECTIFICATIONS DU Ier VOLUME : au lieu de : Ballinger, lisez : Bullinger.