Biographie nationale de Belgique/Tome 3/CAMPANA, Pierre de Kempeneer dit Piedro

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CAMPANA, Pierre de Kempeneer dit Piedro



CAMPANA (Pierre De Kempeneer dit Piedro), peintre né à Bruxelles en 1503, mort dans cette ville en 1580. Ce maître, dont le nom véritable a été récemment découvert par l’auteur de cet article, ne nous est guère connu que par les détails que les écrivains espagnols donnent sur ses travaux; il a cependant vécu en Belgique, mais pendant une époque orageuse, véritablement fatale pour les arts et pour ceux qui s’y livraient. Il partit pour l’Italie. On a répété qu’il y devint l’élève de Raphaél, mais son jeune âge à la mort de ce grand artiste, qui arriva en 1520, ne permet pas d’admettre cette assertion. Campana trouva un protecteur dans le cardinal Grimani et exécuta à Venise une Sainte-Marie-Madeleine conduite au temple par sainte Marthe, qui se trouvait, du temps de Lanzi, en Angleterre, dans la collection de M. Slade. Après Venise, Campana habita Bologne, où, lors de l’entrée de Charles-Quint, en 1529, il fut chargé de couvrir de peintures un grand arc de triomphe, tâche dans laquelle il fit preuve à la fois de talent, d’habileté et d’originalité. Il partit ensuite pour l’Espagne et s’y fixa dans la riche et commerçante Séville, où il était déjà arrivé en 1537 et où il travaillait encore en 1552. Moralès, que les Espagnols ont caractérisé d’un mot en le nommant le divin, fut élève de Campana. Celui-ci a orné les édifices de Séville et des localités du voisinage de toiles où l’on remarque, dit Bermudez, un grande correction de dessin, une connaissance approfondie de l’anatomie du corps humain et de l’art de la composition, une sage entente du clair-obscur et la reproduction fidèle des expressions du visage et des attitudes. Son chef-d'œuvre, la Descente de croix, qui se trouve actuellement dans la sacristie de la cathédrale de Séville, est signé : Hoc opus faciebat Petrus Campaniensis et daté de 1548. Murillo aimait à s’arrêter devant ce tableau et l’on rapporte qu’un jour qu’on le pressait de quitter l’église, il s’écria : « J’attends le moment où notre divin Seigneur aura été entièrement détaché de la croix. » On ajoute qu’afin de donner une dernière preuve de son admiration pour le talent du vieux maître flamand, il voulut être enterré au pied de cette Descente de croix, devant laquelle il s’était si souvent agenouillé.

Campana était, en 1563, de retour à Bruxelles, où le magistrat résolut, le 27 mai, qu’on payerait dorénavant tous les ans, « à maître Pierre De Kempeneer, peintre, » la somme de 50 florins, que Coxie recevait auparavant pour exécuter les patrons des tapisseries bruxelloises. On n’a jusqu’à présent trouvé aucune autre indication qui se rapporte à notre artiste, dont les écrivains espagnols disent qu’il jouissait dans sa patrie d’une si grande considération qu’à sa mort le magistrat fit placer son portrait à l’hôtel de ville.

Campana laissa un fils, nommé Jean-Baptiste, qui ne revint pas en Belgique avec son père et qui ne fut, paraît-il, qu’un peintre médiocre.

Alph. Wauters.

Bermudez, Diccionario historico de los mas illustres professores de las bellas artes en España, t. I, pp. 201-204. — Nagler, Kunstler lexicon, t. II, p. 308. — Alphonse Wauters, Quelques mots sur le Bruxellois Pierre de Kempeneer (Bull. de l’Académie royale de Belgique, 2e série, t. XXIV).