Bourassa et l’Anti-Laurierisme/M. Bourassa jugé par un ex-collaborateur

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M. BOURASSA

JUGÉ PAR UN EX-COLLABORATEUR


Il y eut, une fois dans la politique canadienne, un trio d’hommes politiques dont l’influence fut énorme. Ces trois hommes, très supérieurs, chacun dans sa sphère, se complétaient les uns les autres et aussi longtemps qu’ils restèrent étroitement unis, ils exercèrent une puissance presque irrésistible.

L’un était un orateur adoré des foules, un autre était un homme d’action hardi, avisé, habile et énergique ; le troisième — le seul qui survive aujourd’hui — était la tête qui concevait les plans, dirigeait les manœuvres, préparait les moyens, organisait le succès et en assurait les résultats.

Nous ne mettrons pas les noms sur ces portraits que reconnaîtront tous ceux qui ont suivi la politique canadienne entre 1880 et 1895 et qui se rappellent la fameuse « chambre bleue » à Ottawa.

À eux trois, ils pouvaient faire de grandes choses ; isolés, ils eussent été peut-être aussi impuissants que l’est M. Bourassa à influencer les destinées politiques du Canada.

Car M. Bourassa, dont nous avons toujours reconnu le grand talent oratoire, n’est, en fin de compte, qu’un orateur brillant ; il n’est ni un organisateur, ni un homme d’action. Et son incommensurable vanité l’empêchera toujours de s’adjoindre, avec le partage d’influence que cela comporte, des collaborateurs qui pourraient le compléter.

Cette appréciation du caractère du chef nationaliste, dont nous avons souvent fait part à nos lecteurs, vient d’être confirmée d’une manière bien inattendue par l’un de ceux qui connaissent le mieux M. Bourassa, par l’un de ceux qui ont le plus vécu dans son intimité, par un précurseur presque, par un des fondateurs du nationalisme, M. Olivar Asselin.

On nous permettra bien de citer ce que M. Asselin dit de M. Bourassa dans l’« Action » d’hier, sans que d’ailleurs, nous nous rendions solidaires d’aucune des idées de l’ancien directeur du « Nationaliste » devenu le collaborateur de M. Jules Fournier, après avoir passé comme plusieurs autres à la rédaction du « Devoir ».

Voici :

« La loi réclamée par “Metcalfe street” aurait pour effet, sinon d’empêcher, au moins d’entraver, les opérations de ce genre. Comment expliquer qu’elle n’ait pas encore été proposée dans nos parlements ? Il nous souvient d’un ou deux discours où M. Bourassa en réclamait l’adoption, MAIS SUR CE POINT, COMME SUR BEAUCOUP D’AUTRES, M. BOURASSA S’EST IMAGINÉ QUE TOUTE LA TACTIQUE PARLEMENTAIRE ET TOUT L’ART DE LA POLITIQUE SE RÉSUMENT AUX DISCOURS[1].

Et voilà pourquoi, contrairement à ce qu’ont pu faire les trois personnages dont nous évoquions tout-à-l’heure la mémoire, M. Bourassa ne réussira jamais à être une puissance politique et pourquoi ses entreprises seront toujours stériles.


M. BOURASSA AUX RAYONS X


BAPTISTE — Ton cœur est ben mal placé, pis ben p’tit, mon garçon ; mais, par exemple, t’en as un fiel pas pour rire !

  1. « Le lecteur ajoutera, s’il le veut : et aux rétractations. »