Chansons de route/La Messe au camp
en souvenir d’une Messe aux tranchées de
Fontaine-les-Cappy (27 juin 1915).
LA MESSE AU CAMP
— Mais comment fera-t-on, sergent,
Dans le camp,
Mais comment fera-t-on, sergent,
Pour nous dire la messe ?
— Demain dimanche, huit coups tapant,
Je tiendrai ma promesse.
— Un curé, vous croyez, sergent,
Dans le camp,
Un curé, vous croyez, sergent,
En trouver un, peut-être ?
— Ne sait-on pas, au régiment,
Que moi-même suis prêtre ?
— Sans nappe et sans autel, sergent,
Dans le camp,
Sans nappe et sans autel, sergent,
Comment allons-nous faire ?
— Sur un’caiss’d’approvisionn’ment,
Un’bâch’fera l’affaire.
— La Sainte-Table, alors, sergent,
Dans le camp,
La Sainte-Table, alors, sergent,
En plein air sera mise ?
— Vive le plein air quand l’All’mand
Bombarde les églises !
— Mais comment prévenir, sergent,
Dans le camp,
Mais comment prévenir, sergent,
Que le bon Dieu s’approche ?
— Pour sonner, le bon ralliement
Le clairon vaut la cloche.
— Mais, pour l’Élévation, sergent,
Dans le camp.
Mais pour l’Élévation, sergent,
Où trouver la clochette ?
— Le « soixant’-quinze » au bon moment.
Servira de sonnette !
— À ce moment, pas vrai, sergent,
Dans le camp,
À ce moment chacun, sergent,
S’incline vers la terre ?
— Le front devant Dieu se courbant.
Se r’dress’mieux à la guerre !
Nous n’avons pas d’orgue, sergent,
Dans le camp,
Nous n’avons pas d’orgue, sergent,
Et cela nous tracasse…
— Pour orgue, on aura le bon vent
Qui souffle de l’Alsace !
— Nous demand’rons à Dieu, sergent,
Dans le camp,
Nous demand’rons à Dieu, sergent,
La fin de nos souffrances…
— Ne lui demandez, mes enfants,
Que l’Honneur de la France !
- ↑ La musique d’accompagnement est éditée par M. Georges Ondet, 83, Faubourg Saint-Denis, Paris.