Correspondance 1812-1876, 2/1836/CLV

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CLV

À M. ALEXIS DUTEIL, À LA CHÂTRE


Genève, septembre 1836.


Je passe mon temps fort agréablement à Genève, mon cher ami. Je te raconterai cela en détail, au coin du feu. J’ai à peine le temps de dormir. Mais je veux te dire que j’ai reçu ta lettre et que je te remercie mille fois de t’occuper de ton camarade absent et de ne pas négliger ses affaires, qu’il néglige si bien.

Et la vendange ! cher Dyonisius ? Songe à la vendange ! songe à te faire du vin blanc potable. Ne néglige pas un point aussi important.

Je serai à Nohant dans les premiers jours d’octobre. Je pars d’ici le 30. Je m’arrêterai à Lyon. Je te porte du bon tabac à priser et force cigarettes.

Adieu, bon vieux ; dis à ta femme que je l’aime ; aimez-moi, tous deux. À bientôt !

Mes mioches se portent à merveille. Ils supportent la fatigue héroïquement. Ursule n’est pas de même[1] Elle était très épouvantée l’autre jour de se trouver dans un village appelé Martigny. Elle se croyait à la Martinique et ne se consolait que dans l’espoir d’en rapporter de bon café (historique).

Je suis ici l’objet de la curiosité publique. Je ne fais pas un pas, je ne dis pas un mot qui n’en fasse faire et dire mille. Néanmoins on en est à la bienveillance pour moi, c’est la mode présentement.

Adieu, et me ama.
  1. Ursule Josse, femme de chambre de George Sand.