Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 8-9/1817

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Louis Conard (Volume 8p. 222-223).

1817. À GUY DE MAUPASSANT.
Croisset, 27 février 1879.
Mon cher Ami,

Je retire mes malédictions. Merci de la visite à Baudry. Ce n’était pas de son résultat que j’étais inquiet, mais de vous, de votre pièce. Je voulais avoir des détails vrais.

Enfin, tout a réussi ! Ce qui est fort heureux pour l’avenir. Maintenant, on lira vos manuscrits. Quant aux petites perfidies, vous en verrez bien d’autres. Il faut s’y résigner.

Les naturalistes vous lâchent ; ça ne m’étonne pas. Oderunt poetas.

À propos des naturalistes, que dois-je faire avec votre ami Huysmans ? Est-un homme à qui l’on puisse dire carrément sa façon de penser ? ses Sœurs Vatard me causent un enthousiasme très modéré. Comme il m’a l’air d’un bon bougre, je ne voudrais pas l’offenser. Cependant ?

Maintenant que je connais les sentiments de cet excellent M. Baudry, j’ai un terrain solide sous les pattes et (sans vous compromettre en rien) je m’expliquerai carrément avec ledit sieur. La semaine prochaine il recevra de moi une lettre qui lui clora le bec. Donc, merci encore et ne vous en occupez plus. Tous vos renseignements ne font que confirmer mes prévisions. Ce que je trouve charmant de sa part, c’est la supposition qu’il pourrait être, un jour, contraint à user d’indulgence envers moi. Voilà ce qui s’appelle un bon ami ! et dévoué ! mais on est « comme ça » quand on est fonctionnaire.

Quel embêtement de ne pas se voir ! Comme j’aurais des choses à vous dire et à vous demander ! Si je suis capable d’aller à Paris vers la fin d’avril, ce sera beau. Il faut se résigner. Comment va votre pauvre maman ?

Où publiez-vous l’Histoire du vieux temps ? Quand je serai revenu à Paris, il faudra la faire jouer par Mme Pasca, chez la princesse Mathilde. De cela je me charge.

Votre vieux vous embrasse tendrement.