Correspondance de Voltaire/1737/Lettre 761

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Correspondance : année 1737GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 34 (p. 282-284).
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761. — À M. L’ABBÉ MOUSSINOT[1].
23 juin (1737).


En réponse à votre lettre du 19, je vous envoie un petit modèle de lettre, que monsieur votre frère écrira à M. le comte de Goesbriant. J’y joins un modèle pour le prince de Guise, et M. de Lézeau. Vous ferez d’ailleurs, mon cher ami, tout comme il vous plaira avec l’agent de cette honnête banqueroute. Je crois qu’il n’y a qu’à attendre : M. le comte de Goesbriant est un honnête homme, et son père n’est pas éternel.

Pour les petits miroirs concaves, je viens d’en trouver à Chaumont. J’ai fait mon expérience, qui a assez bien réussi. Ainsi plus de petits miroirs. Je vous supplie seulement de vous informer de ce que coûtera le plus grand miroir, concave des deux côtés, et le plus grand verre ardent, convexe des deux côtés ; bien entendu que vous les éprouverez avant de les acheter. Ce sont là, je crois, des commissions plus amusantes que celle de se mettre au marc la livre avec les créanciers de M. de Goesbriant.

Pour faire une expérience plus singulière, je voudrais avoir des fragments de glaces de toute figure, de toutes grandeurs, doublées de tain, ou non doublées, et j’en voudrais la valeur de six pieds carrés. Des cassures de miroirs ne doivent pas, je crois, coûter cher. Envoyez-moi un bon ballot de ces guenilles, je vous en supplie, le plus promptement que vous pourrez.

Vraiment oui, je veux toutes les pièces qui ont concouru pour les prix de l’Académie des sciences.

J’attends aussi mon arme campagnarde, mes terrines, mes retortes de verre, mes creusets, mon petit secrétaire, le résultat de la conversation avec Geoffroy, etc. Je compte qu’Hébert a ses cinquante louis, et qu’il fait travailler à force.

Je vous prie de vous souvenir que les mille livres de Demoulin sont exigibles au onze de ce mois, et qu’il faut lui faire commandement.

Je me recommande aussi à M. Pâris de Montmartel. Je vous enverrai mon certificat de vie au 1er juillet. Il servira pour recevoir cette pension et dix-huit mois de la rente viagère.

L’accommodement entre M. de Richelieu et moi pour l’affaire de Bouillé-Ménard doit se conclure d’autant plus promptement que M. de Richelieu, par cet arrangement, ne me paye que dans un an, et sans bourse délier, une année qu’il me doit de ma rente.

Mais surtout je vous prie de bien insister sur une délégation qui procure dorénavant un payement certain et périodique de cette rente de quatre mille livres, qui est la plus considérable que j’aie. La vie est courte, et Salomon dit qu’il faut en jouir.

Je me recommande toujours à votre tendre amitié et à votre discrétion.

Je vous prie de me faire chercher une jolie gibecière, avec ses appartenances, marteau d’armes, tire-bourre, etc., le tout emballé avec le reste au coche.

Je ne vous donnerais pas ces commissions-là si je n’y ajoutais le correctif de les faire [faire] par qui il vous plaira. Ne vous gênez jamais sur ces détails. Il faut que nous soyons à notre aise l’un avec l’autre.

Je vous embrasse tendrement.

  1. Édition Courtat.