Aller au contenu

Correspondance de Voltaire/1739/Lettre 1068

La bibliothèque libre.
Correspondance de Voltaire/1739
Correspondance : année 1739GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 35 (p. 169-170).

1068. — À M. L’ABBÉ MOUSSINOT[1].
Ce 12 (février 1739).

Mon cher abbé, quand toute cette affaire de Desfontaines, dont j’aurai, je crois, raison, sera finie, je vous parlerai d’affaires. En attendant, je vous réitère ce que je vous mandais par ma dernière, qu’il faut suspendre le procès et conserver les preuves.

Je vous apprends que MM. d’Argenson, conseillers d’État, dont l’un est à la tête de la littérature, sont nos protecteurs dans cette affaire ; que monsieur l’avocat général, fils de M. d’Aguesseau, s’intéresse pour moi auprès de son père ; que M. le chancelier a déjà commencé même à agir.

Mais voici ce qu’il faut faire pour consommer l’ouvrage. Il faut vous joindre à M, Mignot, à M. de Montigny, à Mme de Champbonin, amener avec vous le gendre de votre frère, qui déposera avoir acheté le libelle chez Chaubert ; il faut vous dire mon parent, comme Mme de Champbonin ; aller tous à l’audience de M. le chancelier, et le remercier en général de la justice qu’il me rendra. Rien ne fait un si grand effet que ces apparitions de famille sur l’esprit d’un juge bien disposé. N’épargnons point les frais ; envoyez savoir le jour de l’audience ; allez prendre en carrosse de remise Mme de Champbonin à l’hôtel Modène, rue du Colombier, ou servez-vous du sien ; écrivez-lui un billet, la veille ou l’avant-veille, pour savoir son heure. Écrivez de même à mon neveu Mignot, rue Cloche-Perce, chez M. de Montignv ; engagez-le à y mener son cousin. Il faut remuer les hommes ; il faut les exciter.

Encore une fois, cette démarche réussira. Je vous prie de la regarder comme une chose essentielle.

Je ne m’endors pas, et j’espère que j’aurai justice. Souvenez-vous, et faites souvenir Mme de Champbonin et mon neveu, que l’abbé Desfontaines a avoué à M. Hérault[2] qu’il était l’auteur du libelle.

Je songe encore qu’il sera très-bon que Thieriot vienne avec vous chez M. le chancelier, pour confirmer par son témoignage ses anciennes lettres, par lesquelles il demeure constant que l’abbé Desfontaines fit contre moi un libelle au sortir de Bicêtre.

Envoyez cela ( ? ), je vous prie, au Père Brumoi, au collège des jésuites.

  1. Édition Courtat.
  2. Le nom est presque indéchiffrable. (G.)