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Correspondance de Voltaire/1757/Lettre 3316

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Correspondance de Voltaire/1757
Correspondance : année 1757GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 39 (p. 175-176).

3316. — À M. LEVESQUE DE BURIGNY[1].
À Monrion, 14 février.

L’esprit dans lequel j’ai écrit, monsieur, ce faible Essai sur l’Histoire génèrale, a pu trouver grâce devant vous et devant quelques philosophes de vos amis. Non-seulement vous pardonnez aux fautes de cet ouvrage, mais vous avez la bonté de m’avertir de celles qui vous ont frappé. Je reconnais à ce bon office les sentiments de votre cœur, et le frère de ceux qui m’ont toujours honoré de leur amitié. Recevez, monsieur, mes sincères et tendres remerciements. Je passe l’hiver auprès de Lausanne, où je n’ai point mes livres : le peu que j’en ai pu conserver est à mon petit ermitage des Délices ; ainsi je n’ai aucun secours pour vérifier les dates.

Il se peut que l’impératrice Constance fût fille du roi de Sicile Roger ; mais il me semble que ce Roger vivait en 1101[2], et Henri VI, mari de Constance, en 1195. Il l’épousa, je crois, en 1186. Cette Constance avait des amants longtemps après cette époque. Il est bien difficile qu’elle soit fille de Roger ; je crois me souvenir que plusieurs annalistes la font fille de Guillaume : je consulterai mes Capitulaires, et surtout Giannone[3], quoiqu’il ne soit pas toujours exact.

Le cardinal Polus[4] pourrait bien avoir écrit la lettre à Léon X, longtemps avant d’être cardinal. C’est de milord Bolingbroke que je tiens l’anecdote de cette lettre ; il en a parlé souvent à M. de Pouilly votre frère, et à moi.

Adrien IV, au lieu d’Alexandre III, est une inadvertance[5] : dans le cours de l’ouvrage, je dis toujours que c’est Alexandre III qui imposa une pénitence à Henri II, roi d’Angleterre, pour le meurtre de Thomas Becket. Je ne manquerai pas de rectifier ces erreurs, et j’oublierai encore moins l’obligation que je vous ai. Il y en a quelques autres encore que je corrige dans la nouvelle édition que font actuellement les frères Cramer. Ils m’ont arraché cet ouvrage, que j’aurais dû garder longtemps avant de le laisser exposé aux yeux du public ; mais puisqu’il a trouvé grâce devant les vôtres, je ne peux me repentir.

J’ai l’honneur d’être, avec toute l’estime et la reconnaissance que je vous dois, monsieur, votre, etc.

  1. Voyez tome XXXV, page 25.
  2. Voyez tome XI, page 408.
  3. Pierre Giannone, historien napolitain, dont l’ouvrage fut brûlé à Rome en 1726. Il est mort en 1758, après vingt-deux ans de détention, âgé de soixante-douze ans.
  4. Voyez tome XII, page 282.
  5. Elle a été corrigée.