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Correspondance de Voltaire/1757/Lettre 3324

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Correspondance de Voltaire/1757
Correspondance : année 1757GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 39 (p. 181).
3324. — À M. D’ALEMBERT.
Février[1].

Voici une paperasse qu’un savant Suisse me donne pour l’article Isis[2]. Si l’article n’est pas fait à Paris, si celui-ci est passable, faites-en usage ; sinon, au rebut. Voici encore le mot Liturgie[3], qu’un savant prêtre m’a apporté, et que je vous dépêche, à vous, illustre et ingénieux fléau des prêtres. J’ai eu toutes les peines du monde à rendre cet article chrétien. Il a fallu corriger, adoucir presque tout ; et enfin, quand l’ouvrage a été transcrit, j’ai été obligé de faire des ratures. Vous voyez, mon cher et sublime philosophe, quel progrès a fait la raison. C’est moi qui suis forcé de modérer la noble liberté d’un théologien qui, étant prêtre par état, est incrédule par sens commun.

On dit, mon très-cher philosophe, qu’il y a dans la canaille de Paris une secte de margouillistes ; ce devrait être le nom de toutes les sectes.

Ces margouillistes, dérivés des jansénistes, lesquels sont engendrés des augustinistes, ont-ils produit Pierre Damiens ? Portez-vous bien ; éclairez et méprisez le genre humain. N’oubliez pas de faire mes compliments à votre immortel confrère. Sans vous deux, et quelques-uns de vos amis, que resterait-il en France ?

  1. Cette lettre, datée du 29 février, comme celle qui suit, dans toutes les éditions de Voltaire, est très-probablement du 19. Elle ne peut être, au plus tard, que du 26 ou du 27. (Cl.)
  2. L’Encyclopédie contient deux articles Isis : l’un, anonyme, est de Diderot ; l’autre, de M. de Jaucourt.
  3. L’article Liturgie dans l’Encyclopédie, est aussi de Diderot.