Aller au contenu

Correspondance de Voltaire/1757/Lettre 3337

La bibliothèque libre.
Correspondance de Voltaire/1757
Correspondance : année 1757GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 39 (p. 191).
3337. — À M. LÉVESQUE DE BURIGNY.
À Monrion, 20 mars.

On ne se douterait pas, monsieur, qu’un théâtre établi à Lausanne[1], des acteurs peut-être supérieurs aux comédiens de Paris, enfin une pièce nouvelle, des spectateurs pleins d’esprit, de connaissances, et de lumières, en un mot, tous les soins qu’entraînent de tels plaisirs m’ont empêché de vous écrire plus tôt. Je fais trêve un moment aux charmes de la poésie et aux embellissements singuliers qui ornent notre petit pays romance, et qui font naître des fleurs au milieu des neiges du mont Jura et des Alpes, pour vous réitérer mes sincères et tendres remerciements. Je vous en dois beaucoup pour la bonté que vous avez eue de remarquer quelques-unes des inadvertances de cette Histoire générale. Je vous en dois davantage pour la Vie d’Érasme[2] et pour celle de Grotius, que vous voulez bien me promettre. Par qui pouvaient-ils être mieux célébrés que par un homme qui a toute leur science et tous leurs sentiments ? J’ai vu un petit manuscrit de M. de Pouilly (que je regretterai toujours[3]) sur Grotius ; mais c’était un ouvrage très-court, et qui entrait dans fort peu de détails.

J’attends avec impatience le présent dont vous avez la bonté de m’honorer. Je ne vous enverrai l’Histoire générale qu’avec les corrections dont je vous ai l’obligation. On en fait usage dans une seconde édition, mais il faut laisser écouler la première. Les libraires à qui j’en ai fait présent se sont avisés d’en tirer sept mille exemplaires pour une première édition que je ne regarde que comme un essai, et comme une occasion de recueillir les avis des hommes éclairés. La Vie d’Érasme et celle de Grotius serviront beaucoup à me remettre dans la bonne voie.

  1. C’est-à-dire à Mon-Repos ; voyez page 189.
  2. Cet ouvrage parut en 1757 ; deux volumes in-12o. Lévesque de Burigny, son auteur, avait publié la Vie de Grotius en 1750.
  3. Burigny s’en est peut-être servi.