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Correspondance de Voltaire/1758/Lettre 3604

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Correspondance de Voltaire/1758
Correspondance : année 1758GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 39 (p. 442-443).

3604. — À M. BERTRAND.
Aux Délices, 9 mai.

Vraiment, mon cher philosophe, il vous est venu là une très-bonne idée. Vous pouvez donner aisément une cinquantaine d’articles d’histoire naturelle, et surtout l’article Tremblement de terre vous est dévolu de droit. Je vais sur-le-champ écrire aux encyclopédistes, et leur donner part du service que vous voulez bien leur rendre. J’insisterai pour qu’on vous envoie les exemplaires déjà imprimés.

J’ai été fort malade à Lausanne. Les Délices réparent un peu le mal que Lausanne m’a fait. Je ne sais si M. de Freudenreich ne viendra pas cette année dans nos cantons ; je me flatte qu’en ce cas vous serez du voyage, et que j’aurai l’honneur de recevoir dans mon petit ermitage les personnes à qui je suis le plus attaché. Vous verrez mes petites Délices un peu plus ajustées qu’elles n’étaient. Je cultive aussi l’histoire naturelle ; mais c’est en plantant des arbres, en faisant des terrasses, des allées, des potagers. Je fais plus de cas d’une bonne pêche que de toutes les coquilles du monde. J’ai reçu votre Gazette italienne des fantaisies qui passent par la tête de nous autres écrivains en Europe. On écrit tant que je suis honteux d’écrire ; mais cela amuse. Quand faudra-t-il envoyer le payement de ce journal ? et à qui ? Je ne sais. Dieu merci, aucune nouvelle ; il me semble qu’il y a plus de quinze jours qu’on n’a massacré personne. C’est une époque singulière.

Mille respects, je vous prie, à M. et à Mme de Freudenreich,

Nous avons une assez bonne comédie aux portes de Genève. Cette ville n’a point encore de théâtre comme Amsterdam ; mais quand il y aura quelques millions de plus dans la ville, il faudra bien alors avoir du plaisir.

Je vous embrasse du meilleur de mon cœur. V.