Correspondance de Voltaire/1762/Lettre 4864

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4864. — À M. LE PRÉSIDENT DE RUFFEY[1].
À Ferney, 22 mars 1762.

Beaucoup de comédies à jouer et à faire, Corneille à commenter, mes terres à labourer, etc., etc., m’ont empéché, mon cher président, de vous remercier aussi vite que je l’aurais voulu. M. de Virey n’est-il pas conseiller de votre parlement non séant ? N’est-ce pas lui qui est venu à Ferney un jour que nous avions trois cents spectateurs et soupeurs. Il arriva tout harassé au milieu de la cohue.

Moi, aller à Paris ! Quelle idée ! J’ai cherché le repos, je l’ai trouvé. Je ne le hasarderai pas ; et d’ailleurs puis-je m’absenter de ma charrue et de Corneille ?

Vous m’avez fait présent d’un sac de navets dont je fais plus de cas que de tous les sacs de procès qui pendent au croc des juges. Il me semble qu’on ménage votre parlement plus qu’on n’a ménagé celui de Besançon[2]. Pour les frères jésuites, je crois qu’ils seront conservés et réformés, et en voici la raison dans le papier honnête et modéré qui m’est venu de Paris.

Je vous embrasse tendrement ; je vous aime et regrette.

  1. Éditeur, Th. Foisset.
  2. Quatre membres de ce parlement avaient été emprisonnés, et trente avaient subi un exil de deux ans et dix mois pour une opposition identique dans sa cause avec celle du parlement de Dijon dans l’affaire Varennes. Mais l’appui de Malesherbes et de la cour des aides de Paris fit triompher le parlement de Bourgogne du ministère.