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Correspondance de Voltaire/1765/Lettre 5971

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Correspondance : année 1765GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 43 (p. 515).

5971. — À M. DE LA HARPE.
2 avril.

Je me doutais bien, monsieur, que les vers charmants sur les Calas étaient de vous[1], car de qui pourraient-ils être ? J’avais reçu tant de lettres au sujet de cette famille infortunée qu’après les avoir mises dans mon portefeuille j’y trouvai votre belle épître sans adresse, et écrite, à ce qu’il me parut, d’une autre main que la vôtre.

J’apprends aujourd’hui par M. le marquis de Ximenès que je vous ai très-bien deviné ; mais je ne sais pas si bien répondre. Mon état est très-languissant et très-triste, et j’ai encore le malheur d’être surchargé d’affaires ; je vous assure que mes sentiments pour vous n’en sont pas moins vifs. J’ai été charmé de la candeur et de la réserve avec lesquelles vous m’avez écrit sur la pièce nouvelle. Cela est digne de vos talents, et met vos ennemis dans leur tort, supposé que vous en ayez. Il n’appartient qu’aux excellents artistes comme vous d’approuver ce que leurs confrères ont de bon, et de garder le silence sur ce qu’ils ont de moins brillant et de moins heureux. Vous avez tous les jours de nouveaux droits à mon estime et à ma reconnaissance, et vous pouvez toujours me parler avec confiance, bien sûr d’une discrétion égale à rattachement que je vous ai voué.

  1. Voici le premier vers de cette pièce adressée À Voltaire, sur la réhabilitation des Calas :

    Tu n’as pas vainement défondu l’innocence.