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Correspondance de Voltaire/1765/Lettre 6042

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Correspondance : année 1765GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 44 (p. 1-2).

6042. — À M. DAMILAVILLE.
5 juin.

Mon cher et vertueux ami, j’ai reçu votre lettre du 29 de mai. Si vous êtes quatre à la tête de la bonne œuvre de faire graver une estampe au profit de la famille Calas, je suis le cinquième ; si vous êtes trois, je suis d’un quart ; si vous êtes deux, je me mets en tiers. Vous pouvez prendre chez M. Delaleu l’argent qu’il faudra : il vous le fera compter à l’inspection de ma lettre.

Ma santé est toujours très-faible, mais il faut mourir en faisant du bien. On s’adresse fort mal quand on veut faire venir de Genève la Philosophie de l’Histoire. M. de Barrière s’est avisé de m’écrire, et de me prier de lui faire avoir ce livre. Il n’est point imprimé à Genève, mais en Hollande, et il se passe trois mois avant qu’on puisse tirer un paquet d’Amsterdam ; d’ailleurs je n’aime point ces commissions. Les jansénistes s’imaginent que, dans les pas étrangers, tout ce qu’on imprime est contre eux ; et on se fait des tracasseries quand on cherche à rendre ce service. Je suis si las de jésuites, de jansénistes, de remontrances, de démissions, et de toutes les pauvretés qui rendent la nation ridicule, que je ne songe qu’à vivre en paix dans mon obscure retraite, au pied des Alpes.

J’ai envoyé à M. de Beaumont un mémoire pour les Sirven. Cette malheureuse famille me fait une pitié que je ne peux exprimer. La mère vient d’expirer de douleur ; elle nous était bien nécessaire pour constater des faits importants. Vous voyez les malheurs horribles que le fanatisme cause !

Adieu ; je vous embrasse tristement. Vous devez avoir reçu deux lettres auxquelles j’attends réponse.