Aller au contenu

Correspondance de Voltaire/1766/Lettre 6542

La bibliothèque libre.
Correspondance : année 1766GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 44 (p. 469-470).

6542. — À M. THIERIOT[1].
23 octobre.

Je paye souvent, mon ancien ami, les tributs que la vieillesse doit à la nature. J’ai de la patience ; mais je n’ai pas de négligence. Si je ne vous ai pas écrit plus tôt, c’est que j’ai souffert beaucoup. La fièvre m’a tellement abattu que j’ai cru que je n’écrirais jamais à personne. Un M. Boissier, père de famille, âgé de cinquante ans, possesseur de deux millions, aimé et estimé dans les deux partis, vient de se jeter dans le Rhône parce que sa santé commençait à se déranger : cet homme n’était pas si patient que moi.

Je me doutais bien que vous renoueriez avec le philosophe Damilaville ; vous devez tous deux vous aimer. J’ai reçu des lettres charmantes, des lettres vraiment philosophiques de votre correspondant d’Allemagne[2]. Je lui pardonne tout.

Surtout portez-vous bien ; c’est un triste état que celui d’un vieux malade. Adieu ; je vous aime comme on aime dans la jeunesse.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Frédéric II.