Correspondance de Voltaire/1767/Lettre 6892
J’ai reçu, mon cher et illustre maître, le paquet que vous avez bien voulu m’envoyer par M. Necker[1] : je vous prie de vouloir bien remercier de ma part l’abbé Mauduit, de la Seconde Anecdote sur Bélisaire[2], qui m’a fort amusé ; la Lettre sur les Panégyriques[3] m’a fait encore plus de plaisir ; elle est pleine de vérités utiles, dont il faut espérer qu’à la fin l’espèce écrivante fera son profit.
Il y a bien à l’Académie des belles-lettres un abbé Foucher, assez plat janséniste, qui même a écrit autrefois contre la préface de l’Encyclopédie ; mais plusieurs de ses confrères, à qui j’en ai parlé, ne croient pas qu’il soit l’auteur du Supplément à la Philosophie de l’histoire[4] ; ils ne connaissent pas même ce beau Supplément, qui en effet est ici fort ignoré, et ne produit pas la moindre sensation : y répondre, ce serait le tirer de l’obscurité, comme on en a tiré Nonotte.
Avez-vous lu les trente-sept propositions que la Sorbonne doit condamner ? Votre ami l’abbé Mauduit ne nous donnera-t-il pas ses réflexions sur ce prodige d’atrocité et de bêtise ? Ce qu’il y a de plus fâcheux, c’est que l’inquisition est ici à son comble ; on permet à toute la canaille du quartier de la Sorbonne d’imprimer tous les jours des libelles contre Bélisaire, et on ne permet pas à l’auteur de se défendre.
Notre jeune mathématicien a fait une petite suite pour l’ouvrage de mathématiques[5] que vous connaissez, où il traite de l’état de la géographie en Espagne ; vous la recevrez incessamment, quelque mécontent qu’il soit de la négligence du libraire.
Adieu, mon cher maître ; je vous embrasse mille fois.